« Travailler après. Chapitre Un. » ETUDE EXCLUSIVE – KPAM, cabinet d’études spécialiste de l’Expérience Collaborateurs, a interrogé les salariés sur leurs conditions de travail en temps de confinement – 27 000 réponses analysées
12 octobre 2020L’étude KPAM permet de mesurer à quoi aspirent les collaborateurs dans le monde du travail de demain :
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37% des salariés français font de la question du transport domicile/entreprise un enjeu central.
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22% expriment spontanément un besoin fort de lien social à l’égard de leur entreprise.
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19% des collaborateurs questionnent les pratiques managériales.
Un état des lieux à valeur nationale
Les 27 000 verbatim remontés par l’enquête de KPAM [i], reflètent des expériences hétérogènes, représentatives de la variété des situations au cours du confinement dans l’ensemble du pays.
Les collaborateurs ont exprimé spontanément une large palette de réactions, très liées d’une part au niveau de maturité de l’entreprise vis-à-vis du télétravail, et d’autre part aux contraintes professionnelles et personnelles.
D’autres facteurs différenciants entrent en jeu : l’expérience personnelle de la pratique du télétravail avant mars 2020, donc l’organisation et l’équipement au domicile, mais aussi l’environnement familial, la culture managériale.
Nous retiendrons que :
- 1 collaborateur sur 5 (20,8%) évoque spontanément les conditions de travail au domicile, l’équipement, la facilité d’organisation,
- ils sont autant (20,3%) à commenter l’espace, le confort du domicile,
- 1 collaborateur sur 5 toujours (19%) cite spontanément la qualité de la relation avec le manager, l’autonomie, comme facteurs clés dans la traversée de cette expérience de travail à distance,
- et enfin, 1 collaborateur sur 7 aborde le sujet de la situation familiale (enfants à la maison ou pas / conjoint également en télétravail ou pas), dans les points qui ont impacté le travail à domicile.
Le souhait d’un nouvel environnement de travail, se fait jour : un environnement à domicile adapté, et un environnement sur site repensé.
En parallèle, des sujets se sont ancrés dans l’esprit des collaborateurs comme des priorités : la disponibilité pour les proches, l’écologie et des dépenses de consommation choisies.
« A l’heure où se discute au plan national l’éventualité d’un nouvel encadrement juridique du télétravail, les salariés, eux, n’ont pas d’hésitations, et s’expriment plus fort sur leurs conditions de travail en présentiel et à domicile, et la nécessité d’un équilibre Vie perso/Vie pro avec un cadre clairement défini. Le télétravail ne s’improvise pas, et le management à distance non plus. », explique Frédéric BALLETTI, Directeur KPAM-RH Expérience Collaborateur.
La volonté de pérenniser le télétravail entre dans cette logique : un télétravail choisi, consacré aux tâches réclamant de la concentration, ou aux tâches plus simples pouvant être effectuées en autonomie. Du temps sur site reste majoritairement souhaité, dédié à certains moments spécifiques du parcours collaborateur, et permettant de maintenir le lien social. Les actions des entreprises les plus engagées en faveur du télétravail peuvent être citées comme des exemples de bonnes pratiques : Accompagnement des télétravailleurs, Politique d’aménagement du poste de travail au domicile, Politique de « droit à la déconnexion » adaptée au télétravail, Reconception des environnements de travail, Mise en place de Tiers lieux, Attention aux Outils collaboratifs, formation et accompagnement des managers dans la relation à distance, …
« L’objectif de notre étude est d’alimenter chez nos clients les DRH et Directions générales de grands groupes français, leurs réflexions sur l’expérience collaborateur de demain : quelles attentes, nouvelles et durables, la gestion de la crise a-t-elle révélées ? Comment le télétravail vécu pendant la crise renseigne sur l’organisation du travail de demain ? Quelles sont les modifications durables provoquées par les bouleversements personnels et professionnels de la crise sanitaire ? », commente Frédéric BALLETTI. « La période ne doit surtout pas être interprétée comme une parenthèse par les entreprises et les décideurs, hors de la normalité, mais bien au contraire, comme un socle fondateur de nouvelles attitudes et demandes. »
Cette étude met en lueur les points d’attention suivants pour les entreprises : la nécessaire formation au management à distance, la mise en pratique sincère des valeurs d’entreprise énoncées, la mise à disposition d’outils de travail digitaux fiables et fluides.
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Les 6 grandes thématiques ouvertes par l’étude KPAM
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Le besoin de sens a été réactivé
Les conditions de vie bouleversées brutalement ont modifié la hiérarchie des besoins et des valeurs, qu’ils soient individuels ou collectifs.
Outre le recentrage sur le besoin primaire de santé/sécurité, devenu central, le besoin de sens émerge fortement. Les enjeux d’utilité, de sens, de reconnaissance, d’équité, d’impact écologique font partie des 5 sujets les plus impliqués, à des niveaux jamais atteints pour certains.
« La crise sanitaire a représenté un moment de vérité pour les entreprises, une opportunité d’incarner les valeurs qu’elles revendiquent et de redonner du sens. C’est un moment de vérité, où les pratiques et les décisions des entreprises sont interprétées par leurs employés comme autant de signaux de la sincérité (ou de l’insincérité) des valeurs et des engagements proclamés. L’impact sur l’attractivité des marques employeurs se joue en ce moment. Les collaborateurs attendent d’être convaincus et souvent de (re)trouver un sentiment de fierté d’appartenance. Ils attendent de voir des actes alignés sur les discours », commente Anne GEIG, cofondatrice du cabinet KPAM, responsable de l’étude.
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Un équilibre vie personnelle – vie professionnelle retrouvé
La thématique des transports est la plus abordée (par 37,4% des répondants).
Ceux des répondants qui évoquent le transport disent avoir ressenti pendant ce télétravail forcé, une véritable libération : un gain de temps, un temps maîtrisé débarrassé des transports subis, un gain de sérénité, un moindre stress. Une prise de conscience de la charge mentale des transports, de sa place excessive, une volonté durable de limiter cette contrainte, est exprimée.
Un meilleur équilibre vie personnelle-vie professionnelle est l’un des grands gagnants de cette période (sujet évoqué par 26,8% des répondants).
Toutefois, ce bénéfice collatéral de la crise n’est pas partagé par tous. Certains employés ont, au contraire, été submergés par la charge concomitante des tâches familiales, domestiques, professionnelles (notamment les mères célibataires…), par la difficulté de cohabiter dans de petits espaces, ou au contraire par l’isolement et la solitude.
Les télétravailleurs novices ont par ailleurs éprouvé des difficultés de déconnexion et se sont facilement laissé envahir. Ils soulignent le manque de sas de transition entre les sphères personnelles et professionnelles, sans avoir pu trouver de solutions d’autodiscipline pour se contraindre à un meilleur cloisonnement.
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L’épreuve du feu pour les managers
Les sujets du management ou de l’autonomie ont été abordés par 19% des répondants. Les pratiques de management se sont révélées décisives dans la qualité de l’expérience vécue.
La plus grande autonomie accordée par une majorité de managers a été particulièrement bien accueillie.
La capacité à faire confiance s’est révélée déterminante, contre des profils « Je pense donc Tu suis » qui ont fait du dégât. Les écarts se sont creusés entre ‘bons’ et ‘moins bons’ managers. Le Covid a été un moment de vérité, une épreuve du feu.
En complément de la capacité de confiance, les managers avaient un rôle clé à jouer, de cohésion, de motivation, de maintien du lien et de soutien pour les plus fragiles.
Les managers plébiscités par leurs équipes ont su faire preuve de ‘Care’, dans un moment où les collaborateurs en avaient intimement besoin. Ils ont su se soucier de façon individualisée des plus fragiles. Ils ont démontré leur soutien aux personnels engagés sur le terrain.
Le management à distance ne s’improvise pas. Les managers qui avaient des dispositions naturelles d’empathie, des compétences de communication, des méthodes d’encadrement basées sur la confiance ont eu de grandes facilités à s’adapter. Les autres se sont trouvés démunis et ont formulé un besoin d’accompagnement et de formation. L’empathie n’est pas une facilité accessible à tous, qu’il suffirait de mobiliser. Certains managers ont été submergés par la charge de travail accrue et l’attente de soutien et de communication de leurs équipes. Les témoignages font part de managers en souffrance, parfois ‘abandonnistes’, ou au contraire de maniaques du contrôle, ayant mis en place des pratiques de ‘surveillance’.
La qualité de la communication a été un enjeu pour maintenir l’engagement et la confiance : la capacité à communiquer au fil de l’eau dans une période d’incertitude, à ne pas donner le sentiment de ‘cacher’ des choses a été déterminante (par exemple le nombre de collaborateurs malades).
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Un besoin de lien social aigu
La période a amplifié le besoin de lien social, dans un moment de recentrage sur l’humain.
C’est le 3ème sujet le plus abordé, évoqué par 22,8% des répondants. La solidarité entre collègues s’est révélée dans certaines équipes, même si en moyenne, la perte des échanges physiques a compté parmi les choses les plus difficiles à vivre.
De nombreuses initiatives de maintien d’échanges informels ont été lancées pour conserver la cohésion : des e-cafés, e-apéros, groupes WhatsApp, etc. Mais c’est avant tout le sentiment d’appartenance qui s’est révélé déterminant pour maintenir l’engagement des collaborateurs. Comment s’active ce sentiment d’appartenance ? Derrière des pratiques variées, comme la création de rituels d’équipe, les collaborateurs doivent surtout trouver du sens, une direction claire, un sentiment de mobilisation de l’entreprise ou de leur équipe vers un objectif en ligne avec leurs valeurs.
Un signal faible : la possibilité de voir les visages via les outils de visioconférence, ‘plus vivants’, a contribué au réconfort attendu et au maintien du lien. Les collaborateurs qui n’avaient pas accès à cette possibilité ont davantage souffert de l’isolement.
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Une critique de l’environnement de travail sur site.
Le sujet des conditions de travail au domicile a été abordé par 20,3% des répondants.
Les bénéfices du télétravail (silence, capacité de concentration…) portent en creux une critique de l’environnement de travail sur site et le rejet des espaces partagés :
- Le bruit, les difficultés de concentration, les interruptions et sollicitations permanentes
- L’impossibilité de choisir un niveau de confort personnalisé (luminosité, température)
- La mauvaise ambiance dans certaines équipes
- Le temps perdu à chercher une place de parking ou une place au restaurant d’entreprise
- Le stress du transport / la pression du temps : le stress des réunions fixées à 18h00 pour les jeunes parents
Des attentes sont formulées vis-à-vis de l’environnement en télétravail : les télétravailleurs novices soulèvent la question de la participation aux frais de la part de l’entreprise (forfait internet, forfait téléphone personnel…) et le besoin d’un équipement minimum selon le métier (siège ergonomique, taille d’écran, casque, clavier, souris, etc.).
« Une attente de tiers lieux, plus proches du domicile, lieux de partage, de stimulation et d’ouverture via le côtoiement d’autres métiers, se manifeste. Lorsque le domicile n’est pas propice au télétravail, proposer un lieu qui offre les avantages liés au gain de temps devient clairement un avantage concurrentiel », explique Frédéric Balletti.
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Une attente renforcée d’outils fluides, fiables, partageables par tous
La dépendance aux outils, accrue pendant cette période, a pénalisé les entreprises ou équipes aux outils moins performants et a amplifié des points de douleur qui préexistaient à la crise.
Le sujet des outils et applications a été abordé par 12,2% des répondants.
À distance, la défaillance des outils s’est avérée encore plus frustrante et énergivore. Les attentes de fluidité et de fiabilité sont celles des outils du marché, devenus les standards de qualité attendus (WhatsApp, Zoom, Highfive…). Les collaborateurs attendent aussi des outils compatibles, partageables avec les acteurs de l’écosystème de l’entreprise (clients, prestataires…). Les outils internes ont souvent été à la peine. Dans ce contexte, les équipes de support informatique qui ont pu efficacement et rapidement dépanner ou équiper les collaborateurs ont été accueillies en sauveurs (grande intensité d’enchantement, signe de la frustration de cette dépendance).
Les collaborateurs ont décrit une véritable accélération digitale opérée lors des semaines de confinement, jugée bénéfique pour l’entreprise, avec la satisfaction d’avoir personnellement développé des compétences.
#COVID #ETUDE #RH